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Lola voleuse, avant la tempête 

D’une douce voix accordée à son regard piquant, Lola Lafon écrit et chante.

Ses deux premiers romans, Une fièvre impossible à négocier (2003) et Déjà ça me console (2007), existent en poche, sont déjà traduits en plusieurs langues dont le Bulgare, le Roumain et l’Italien, que Lola Lafon parle couramment. Voici maintenant Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce, attendu pour le 20 mars, dans lequel Lola Lafon combine son talent pour la fiction et ses observations perplexes sur l’état du monde. Titré d’après une célèbre phrase, prononcée par des anarchistes hâtivement condamnés à mort lors des émeutes historiques de 1886 à Chicago, cet ambitieux roman dépeint l’amitié peu commune soudant deux parisiennes d’aujourd’hui, dont l’une est malheureusement tombée dans le coma…. Et bien plus encore, si l’on en croit les commentaires de l’auteur: « C’est une apologie de l’insurrection nécessaire, un roman sur la résistance aux normes sociales ou biologiques. De fait, il contient une proposition de morale et il affirme que, parfois, c’est l’imprudence qui nous sauve. »

Forts d’un succès croissant, les livres de Lola Lafon s’accompagnent toujours de chansons occasionnant des « concerts lectures » plutôt que des concerts tout court. Un choix qui, au fil du temps, est devenu sa revendication: « La qualité d’écoute du public est sans comparaison dès lors qu’on se donne le droit d’ouvrir un livre sur scène. » En 2004, Lola Lafon avait ainsi sorti Grandir à l’envers de rien, premier disque révélant sa voix douce affable et des sonorités balkaniques rock-folk mûries au fil d’une enfance expatriée entre la Bulgarie et la Roumanie, où ses parents enseignants étaient alors expatriés. Cette fois-ci, le disque présenté s’intitule Voleuse. Plus pop et plus maîtrisé que le précédent, fort d’une production signée Christian Olivier (Têtes Raides), il est aussi serti d’un texte offert par Dominique A (L’abandon). « Cela sonne plus européen qu’avant. Sachez que je n’écoute pas que du folklore roumain, j’aime aussi Cat Power! », précise la chanteuse en riant.
Discrète et bohème

Dominique A? « Je suis fan. Ne le connaissant pas, je lui ai écrit un email énamouré afin de l’approcher », avoue-t-elle, baissant ses grands yeux ronds avant de les redresser, scintillants: « Et voilà qu’il me répond qu’il a beaucoup aimé mon premier album et qu’il serait ravi de m’aider! Je me suis évanouie. Quelques temps plus tard, il m’a envoyé la maquette de L’Abandon… »

Discrète et bohème, l’artiste raconte avoir enregistré ces quinze nouvelles chansons dans son petit deux pièces. « On ne sentait pas très bien dans un studio professionnel, alors on a choisi de le faire chez moi. Cela permet de travailler sans pression, sans notion de temps. » Serrer les musiciens dans un espace inférieur à 30 mètres carrés l’a plutôt amusée, en fin de compte. « Le plus compliqué, c’était de faire très attention au micro ancien qu’on m’avait prêté, il coûte très cher, je ne pourrais pas le rembourser. Mais il apporte un grain qui m’est très précieux. Et puis il a fallu bricoler un tas de solutions pour faire les branchements, assurer l’insonorisation… »
Un optimisme débonnaire

Le titre, Voleuse, vient de Lou Andréa Salomé, la maîtresse de Nietzsche. « Si tu veux une vie, voles là » cite Lola Lafon, qui décidément connaît ses classiques, et les revendique. « J’aime cette affirmation, elle dit aussi l’état de celui qui écrit, toujours hanté d’influences plus ou moins volées, consciemment ou pas. Et en ces temps tristes et moraux, où l’on stigmatise un voleur de biscuit alors qu’il est au RSA, j’aime l’idée… » Une idée qu’elle estime raccord avec son optimisme débonnaire. « Je ne crois pas à la passivité. Les temps font peur mais je ne pense pas non plus qu’on va disparaître avec 2012. Au contraire, on va peut-être bien se révéler, se réveiller! » Dans l’un de ses chants, le bien nommé En Résistance, elle évoque pourtant une jeunesse de France démunie, sans convictions ni oxygène. « Mais c’est sans renoncer à l’espoir, bien au contraire! Ces couplets sont directement inspirés de La Confession d’un enfant du siècle, le seul roman d’Alfred de Musset. Un écrit très actuel, qui donne à ressentir à quel point le sentiment de ne pas être à l’aise dans son époque demeure contemporain. Ce constat n’est pas incompatible avec un réveil, un sursaut… »

Et c’est sur une cadence lourde, pesante mais résolue au point de s’alléger en chemin, que la chanteuse écrivaine, nous invite « maintenant ou jamais » à entrer dans sa « danse résistance… » Une danse toute trouvée pour cette conscience agitée qui, avant d’affirmer ses talents de « femme de lettres » (dixit l’encyclopédie libre Wikipedia, au grand étonnement de la première concernée), se rêvait danseuse…

Source Internet : http://www.lejdd.fr/Culture/Musique/Actualite/Lola-voleuse-avant-la-tempete-284679/ 

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